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Portfolio – 3. Violences et Transgression en temps de guerre

Nathalie Barrandon, Isabelle Pimouget-Pedarros (dir.), La transgression en temps de guerre de l’Antiquité à nos jours, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Enquêtes et documents », 2021.

De toutes les activités humaines, la guerre celle qui est le plus susceptible de conduire à la violation de normes fondamentales. Elle constitue un champ d’étude privilégié pour aborder la question de la transgression. L’historiographie s’est en définitive peu intéressée aux mécanismes de déclenchement ainsi qu’à la construction des intolérables dans ou en marge des conflits armés. Cet ouvrage tend à combler une lacune par une réflexion collective et pluridisciplinaire reposant sur une analyse de textes et d’images de l’Antiquité à nos jours.

Il est le fruit des recherches réalisées dans le cadre du programme ANR PARABAINÔ “Massacres, violences extrêmes, transgressions en temps de guerre (Antiquité grecque et romaine)”, dont le CERHiC est partenaire. L’objectif scientifique de ce programme est d’étudier la genèse de ces pratiques afin d’inscrire l’Antiquité dans la compréhension globale des génocides et des violences de masse ; les résultats obtenus ont vocation à enrichir la connaissance des sociétés anciennes et à produire un savoir susceptible de contribuer à la réflexion d’ensemble sur le sujet.

N. Barrandon, I. Pimouget-Pedarros, La transgression en temps de guerre, de l’Antiquité à nos jours, PUR 21.

Les recherches sur les génocides mettent en valeur l’intemporalité des violences de masse, mais aussi la difficulté à les questionner en usant d’un mot élaboré par les Occidentaux au 20e siècle ; l’un des principaux verrous scientifiques à lever est donc d’ordre terminologique et plus largement conceptuel. Leur étude par le prisme de la transgression peut permettre de contourner l’écueil inhérent à toute catégorisation juridique et d’écarter ainsi toute forme de hiérarchisation. En replaçant le génocide dans une analyse globale et en ne faisant pas du qualificatif un prérequis à la compréhension de la guerre d’anéantissement et des actes traumatiques qui l’accompagnent, c’est un regard nouveau des temps passés et éclairant pour nos sociétés contemporaines qui est proposé.

L’ouvrage aborde trois thèmes : Normes et seuils ; Cruauté et paroxysme ; Images et représentations. Il explore de multiples terrains et contextes : l’Antiquité grecque et romaine, Byzance, l’Espagne au temps de Goya, le Rwanda et la Syrie contemporaines. Ce travail conduit à réfléchir sur la fabrique du sacré, sur les notions de communauté, de genre et d’identité et enfin sur celle de cruauté et la jouissance qui l’accompagne. L’approche privilégié est celle de l’analyse des discours. La diffusion des nouvelles, puis leur mise en récit, sont autant de reconstructions narratives qui témoignent d’un choc émotionnel dans une guerre qui se veut pourtant encadrée par des règles. Le principe d’étudier les acteurs et les promoteurs de la transgression en temps de guerre, soit « les entrepreneurs », est donc également des plus pertinents pour enrichir le champ disciplinaire que ce livre entend ouvrir.

Image mise en avant : Mémorial du génocide, Kigali, Rwanda. Photo de Paul Heckel sur Flickr, 2013.